Cheffes, le restaurant engagé au service de la ville
Certains projets sortent du lot en matière de restauration durable. C’est le cas du restaurant Cheffes, un café-cantine engagé, solidaire et convivial implanté au rez-de-chaussée de la Cité maraîchère de Romainville. Découvrez la démarche de ses trois fondatrices qui proposent une cuisine éco-responsable et gourmande.
Un lieu d’exception
Avec ses deux tours de trois et six étages de serres, la Cité maraîchère s’élève au-dessus du quartier populaire Marcel Cachin à Romainville, en Seine-Saint-Denis. Une vision futuriste qui veut du bien à ses habitants.
La Cité maraîchère au cœur de Romainville
La Cité maraîchère a réussi la prouesse d’implanter 700 mètres carrés de surfaces cultivables en plein cœur de l’un des départements les plus denses de France. Au sous-sol on y fait pousser champignons et endives et aux étages des fruits, légumes et herbes aromatiques en rotation au fil des saisons.
Les produits sont ensuite proposés en vente directe aux riverains en fonction du quotient familial ainsi qu’au restaurant Cheffes qui occupe le rez-de-chaussée.
Épicentre du bien-manger dans le 93, la Cité maraîchère propose également aux élèves de la ville et aux résidents des ateliers de sensibilisation à l’alimentation durable.
Cheffes : vainqueur d’appel à projet
Sortie de terre en février 2021, la Cité Maraîchère est un équipement municipal. Outre les surfaces de culture, elle dispose d’un grand espace d’accueil au rez-de-chaussée. Et c’est dans cet espace que la ville souhaitait implanter un espace de restauration éco-responsable. Pour trouver des occupants, la municipalité a donc lancé un appel à projet en juillet 2021. Hawa Touré, l’une des fondatrices du restaurant Cheffes raconte à Brut : « on a postulé et on a été lauréates ! Il fallait une philosophie éco-responsable qu’on a. » La suite s’est construite pas à pas.
Un concept inclusif
Le café-cantine est un véritable modèle de diversité, dans la composition de ses équipes, dans l’assiette, mais aussi dans le public qu’il accueille.
Une équipe féminine
Ici, l’équipe est 100 % féminine, ce qui est suffisamment rare en restauration pour être souligné. « Au début on devait s’appeler Meufs et finalement on a opté pour notre nom parce qu’on est trois cheffes. Moi je suis cheffe en cuisine, Lauranne est cheffe pâtissière, et Léa est cheffe de salle », confie Hawa Touré lors d’une interview accordée au magazine Initiatives.
« Que trois femmes, moi issue de quartiers populaires, Léa qui vient de Bourgogne et Lauranne qui vient aussi de quartier populaire, aient réussi à construire un lieu comme ça, cela nous rend très fières ! »
Et les femmes sont aussi en salle. Chez Cheffes, pas de tables numérotées. À la place on trouve sur chacune d’elles un petit panneau présentant une grande figure féminine de notre siècle. Selon où les convives sont installés, ils peuvent donc découvrir les parcours de Rokhaya Diallo, Gisèle Halimi, Faïza Guène, Alice Coffin ou encore Korotoum Tandian…
Restauration de saison
Outre son emplacement particulier en plein cœur d’une serre urbaine, le restaurant poursuit son engagement éco-responsable dans l’assiette. Chez Cheffes, la carte change tous les jours et évolue au fil des saisons. « On cuisine la plupart du temps des ingrédients qui poussent ici, dévoile la cheffe de cuisine. Les champignons on a été les cueillir tout à l’heure et on les a cuisinés à 9h30 pour le service du midi », illustre-t-elle.
Une cuisine fusion
Qu’est-ce qu’on y mange ? Une cuisine fusion qui mélange les cultures, notamment la cuisine d’Afrique de l’Ouest puisque la cheffe est malienne. La carte propose des plats 100 % faits-maison, avec à chaque fois une option végétarienne (mafé végan, galette de pomme de terre avec des champignons…). Le slogan du café-cantine donne le ton : ici, on déguste « la cuisine de maman en mieux ».
Une restauration accessible
« C’est un café-cantine où l’on peut venir déjeuner tous les jours car le menu change quotidiennement, précise Léa, la cheffe de salle. On a toujours deux entrées, deux plats et deux desserts. Vous pouvez aussi venir pour le goûter ou le petit-déjeuner. »
Pour répondre aux exigences du lieu, l’équipe s'attèle à proposer des menus à petit prix. « On voulait proposer des plats pas trop chers pour que tout le monde puisse venir manger notre cuisine », souligne Lauranne Sambar, la cheffe pâtissière. Un pari réussi avec un menu Entrée-plat ou plat-dessert à 13,5 euros, le plat seul proposé à 10 euros, et la version enfant à 6 euros.
Cheffes : plus qu’un restaurant
Outre une cuisine saine et gourmande, le restaurant propose un véritable espace d'échange pour les habitants du quartier.
Un lieu de vie
Implanté dans un quartier populaire, le restaurant a pour ambition de mélanger les publics, explique Léa Letellier. « C’est pour ouvrir le lieu à tous et brasser la population qu’on ouvre toute la journée. On va avoir des publics différents en fonction du petit-déjeuner, du goûter, avec la Maison des séniors d’à côté et les gens qui habitent ici depuis des années, qui viennent se retrouver entre amis. C’est important pour nous que ce ne soit pas juste un restaurant. »
Cheffes : un lieu culturel et d’échange
Pour dynamiser les lieux, les trois responsables ont prévu une programmation artistique et engagée avec des brunchs thématiques, des soirées stand’up, poésie ou slam.
Cheffes accueille également le festival Romainville comestible tourné vers l’alimentation durable ou encore des résidences de cheffes venues de l’extérieur tous les dimanches. « Une fois par mois, on fait aussi venir un agriculteur pour parler de ce qu’il produit, explique Hawa Touré. On appelle ça les “Agri Culture”. Quand il vient, il présente son produit et le propose en vente directe aux clients. »
Autant d’activités qui font vivre le lieu autrement, attirant une clientèle variée, sensible aux engagements portés par la ville.
Entre alimentation durable, inclusion et diversité, le restaurant s’inscrit dans une dynamique globale positive. Un bel exemple de ce à quoi la restauration durable peut ressembler.